Victor Schoelcher, franc-maçon, républicain, défenseur des libertés, père de l’abolition de l’esclavage

Victor Schoelcher, franc-maçon, républicain, défenseur des libertés, père de l’abolition de l’esclavage

Victor Schoelcher, franc-maçon, républicain, défenseur des libertés, père de l’abolition de l’esclavage, précurseur de l’abolition de la peine de mort.

En ce 27 avril 2021, jour du 173e anniversaire du premier décret d’abolition de l’esclavage (1848), il semble utile de rappeler le tribut apporté par Victor Schœlcher à cette noble cause et à tant d’autres. Victor est né le 22 juillet 1804 à Paris, 60 rue du Faubourg Saint Denis. Son père Marc, alsacien originaire de Fessenheim, est artisan en faïences et porcelaines et sa mère, Victoire Jacob est originaire de Meaux[1].

Autodidacte, il travaille avec son père jusqu’à son décès et à la disparition de sa mère cinq ans plus tard, il devient rentier avec un capital qui lui permet de réaliser ses passions. Il fréquente de manière assidue les salons de la bourgeoisie parisienne et devient l’ami d’Ernest Legouvé[2]. Il y rencontre également George Sand[3], et des musiciens célèbres comme Franz Liszt[4]- avec qui il se lie d’une amitié profonde.

Très jeune il est attiré par les idées républicaines, et écrit des articles dans plusieurs journaux : « La Revue Républicaine », la « Revue du Progrès Social » et « la Réforme » créé par Ledru-Rollin[5]. Il est influencé par diverses personnalités notammentSimon Bolivar[6] et Alexander Von Humboldt[7]. Ultérieurement il milite pour une instruction primaire publique, gratuite, obligatoire et laïque.

Infatigable voyageur Victor découvre l’esclavage dans les colonies espagnoles américaines. Atterré par cette situation il rédige un ouvrage[8], ainsi qu’un projet de législation avec des propositions d’émancipation des esclaves dans un cadre de mesures visant à rétablir leur protection et dignité. Plus tard, il recherche des solutions au travers d’une enquête menée en Haïti, où Toussaint Louverture[9] a aboli l’esclavage immédiatement à la déclaration de l’indépendance de l’île.

Il devient un fervent défenseur de la liberté immédiate qu’il soutient au travers d’articles, de publication de livres[10]-[11], après avoir vu les durs traitements subis par les esclaves et les abus auxquels se livrent les propriétaires. Il dénonce les méfaits de l’esclavage au point de vue humain, mais également la traite des Noirs entre l’Afrique et l’Amérique.

En 1848 il est nommé, par le Ministre François AragoSous-Secrétaire d’Etat à la Marine et aux Colonies ainsi que Président de la « Commission d’abolition de l’esclavage » créée par décret précisant que « nulle terre française ne peut plus porter d’esclaves »[12]

Cette fonction lui permet de mettre en œuvre parallèlement ses idées républicaines en faveur de l’application du suffrage universel, de l’abolition de la peine de mort, de la reconnaissance des droits civiques des femmes, de l’élaboration d’un droit des enfants[13]. Ainsi le décret du 27 avril 1848 abolit-il définitivement l’esclavage en France[14].

Après le coup d’état de Louis-Napoléon Bonaparte le 2 décembre 1851, il participe au Comité de résistance et à l’insurrection sur la barricade du Faubourg St Antoine. Le 9 janvier 1852 un décret d’expulsion lui interdit le territoire national. Il gagne alors l’Angleterre et réside à Londres puis à Chelsea. Durant cet exil il correspond et rencontre d’autres proscrits dont Victor Hugo ; membre de la « Société pour l’amélioration du sort des femmes »[15].

Il retrouve sa patrie en 1870. Une année plus tard, il est élu député de la Seine, en même temps que Victor Hugo, Léon Gambetta[16], Garibaldi[17], etc. Face à l’horreur de la guerre civile les tentatives de conciliation qu’il mène sont refusées par les deux camps. Il continue sa carrière politique et il est réélu au poste de député de la Martinique puis de sénateur. Il continue à écrire sur le sujet de l’esclavage d’autres pays.

S’engageant en Franc-Maçonnerie, jeune, il est initié à la Loge « Les Amis de la Vérité », à l’Orient de Paris et sera membres de plusieurs loges en France et en Angleterre. (Durant son exil, il est membre de la Loge, « Les Philadelphes » à l’Orient de Londres. Le 23 Février 1844 il s’affilie à « La Clémente Amitié »[18]. On le retrouve également membre de la Loge « Renaissance par les Emules d’Hiram ». Ces deux loges sont toutes deux à l’Orient de Paris.[19]

Les dernières années de sa vie se déroulent à Houilles, près de Paris. C’est là qu’il décède le 25 décembre 1893. Une foule immense composée de personnalités du monde politique, d’associations, de journalistes, ainsi que des nombreux anonymes assiste à son inhumation au cimetière du Père-Lachaise (Paris).

L20 mai 1949, par décision de l’Assemblée Nationale et du Président du Conseil de la République, Gaston Monnerville[20], son corps est transféré au Panthéon en même temps que la dépouille du Guyanais Félix Éboué[21], premier homme noir à y être inhumé.

 

 

[2] Legouvé Ernest (1807-1903))

[3] George Sand, née Amantine Aurore Lucile Dupin baronne Dudevant par mariage (1er juillet 1804-8 juin 1876) .

[4] Liszt, Franz (Ferenc) (1811 - 1886) : Il a été initié Franc-maçon à la Loge « Zur Einigkeit », (« L’Union »), à l’Orient de Francfort-sur-le-Main, Allemagne. Il a été membre de la Loge « Modestia cum Libertate », à l’Orient de Zurich, Suisse (Dictionnaire de la Franc-Maçonnerie - Daniel Ligou -.

[5]Ledru-Rollin Alexandre (1807 -1874)

[6] Bolivar Simon (1783 – 1830)

[7] Von Humboldt, Friedrich Wilhelm Christian Karl Ferdinand, Baron (1769 - 1859): membre de la Loge « Tugendbund » (« Ligue de la Vertu » en Allemagne (De Verlichte Loep, groupe de recherches « De Getande Rand »)

[8] Victor Schoelcher : « De l’esclavage des noirs et de la législation coloniale » Paris, Paulin, 1833

[9] Toussaint Louverture, François-Dominique, à l’origine Toussaint de Breda (1743 - 1803) aurait été Franc-Maçon en Haïti (La fédération Maçonnique Haïtienne)

[10] Victor Schoelcher : « Des Colonies françaises. Abolition immédiate de l’esclavage ». Paris, Pagnerre, 1842

[11] Victor Schoelcher: « Histoire de l’esclavage pendant ces deux dernières années ». Paris, Pagnerre, 1847

[12] www2.assemblée-nationale.fr14/evenements/2016/abolition-de-l-esclavage-1794-et-1848/1848-l-abolition-definitive

[13] Schmidt N. «  Schoelcher : Une vie, un siècle. L’esclavage d’hier à aujourd’hui », (https://www.senat.fr/ (consulté le 29.11.2020)

[14] L’esclavage a été aboli le 16 Pluviôse An II puis rétabli par Napoléon 1° le 30 floréal an X (20 Mai 1802).

[15] Nelly Schmidt note que « les comptes rendus des réunions de cette société de même que ceux des congrès anticléricaux font apparaître [mes] liens et le soutien [que j’ai] manifesté à l’égard des travaux de Maria Deraismes ». Nelly Schmidt : « Schoelcher mythe et réalité » [article] Revue d’Histoire du XIXe siècle - 1848 Année 1988 4 pp. 51-73.

[16] Gambetta Léon (1838-1882) : initié à la Loge « Réforme », à l’Orient de Marseille (Dictionnaire de la Franc-Maçonnerie - Daniel Ligou - Presses Universitaires de France - 1987) et membre de la Loge « La Clémente Amitié », à l’Orient de)

[17] Il a été initié Franc-Maçon à la Loge « Asilio de la Virtud », numéro 217 et membre de la Loge « Amis de la Patrie », à l’Orient de Montevideo, Uruguay. Il a été membre  de nombreuses autres loges étrangères (Dictionnaire de la Franc-Maçonnerie - Daniel Ligou - Presses Universitaires de France - 1987)

[18] Ulrich-Girollet A. : « Victor Schoelcher Républicain et Franc-Maçon » 2° édition. Edimaf 2001.

[19] Dictionnaire de la Franc-Maçonnerie - Daniel Ligou - Presses Universitaires de France - 1987

[20] Monnerville, Gaston (1897 - 1991) : Initié Franc-Maçon à la Loge « Le Flambeau » à l’Orient de Toulouse, il fut membre de la Loge Maçonnique « Fidélité et Prudence ». Il est également membre du Conseil Fédéral de la Grande Loge de France. (De Verlichte Loep, groupe de recherches « De Getande Rand »).

[21] Éboué, Félix (1884 - 1944)